ST. CESAIRE

LA COOP AGRICOLE DE LA VALLÉE D’YAMASKA
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Société Coopérative Agricole de la Vallée d’Yamaska !
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La culture du tabac à Saint-Césaire

Lorsque nous circulons dans la région aujourd’hui, c’est la culture du maïs qui domine le paysage agricole. Autres temps, autres mœurs… Au début du XXe siècle et jusque vers les années 1960, c’était la culture du tabac qui avait la faveur d’un grand nombre de cultivateurs dans la région. M. Ovila Sansoucy nous résume la façon traditionnelle de pratiquer cette culture à Saint-Césaire. 

« J’étais petit bonhomme quand j’ai commencé à planter du tabac en 1915. Mon père a toujours été planteur. On plantait environ 15 000 pieds de tabac à la main; ça veut dire à peu près 2 arpents en superficie. On commençait au printemps, on faisait des couches chaudes puis les semis. Ensuite, fin mai ou début juin, on plantait. Ça prenait un terrain bien engraissé, situé au niveau de l’eau parce que c’était plus frais; le tabac c’est capricieux, ça demande beaucoup de chaleur et un peu de pluie, mais pas trop de vent ni de grêle. 

Une fois poussés, les plants avaient à peu près trois pieds de haut et possédaient de 15 à 18 feuilles par plant. Les feuilles de tête étaient les moins longues et les têtes du milieu étaient les plus longues. Quant aux feuilles du pied, elles étaient minces et petites; c’était le tabac le moins fort. 

Ensuite, trois semaines avant de couper les plants, on cassait la tête. Il poussait un drageon entre la feuille et la tige. Il fallait casser ça sinon ça poussait aussi long que le plant et ça fleurissait. Dans l’temps, on coupait le tabac avec une hache; après ça, on a eu un couteau spécial à mancheron de bois. Une fois le tabac coupé, on s’en allait à genoux, puis on plantait un clou de 1½ pouce en biais dans le p’tit bout du coton. Après cela, on le charriait en voiture jusqu’au séchoir. Chez nous, c’était une bâtisse de quatre étages. Là, il fallait pendre les plants sur une broche, puis on les laissait sécher trois mois. Ensuite, on mettait le tabac en ballots de 50 livres qu’on allait porter à la coopérative au village. » 

Édrageonnage des plants de tabac (enlever les excroissances qui poussent sur la tige entre les bonnes feuilles) par M. Paul-Émile Larose et ses fils, le long de la rivière Yamaska à Saint-Césaire en 1956.

Dessin publicitaire de la Société Coopérative Agricole de la Vallée d’Yamaska.

Vue de la gare de Saint-Césaire et des édifices de la coopérative de tabac vers 1920.

Le travail à la Société Coopérative Agricole de la Vallée d’Yamaska

Les employés travaillant pour la coopérative sur une base saisonnière sont majoritairement des femmes, mais on compte aussi un bon nombre d’enfants ainsi que des ouvriers. Les hommes participent à la manipulation des ballots de tabac, au classement du tabac et au mouillage des gros tas de tabac « mulons » ; ils voient également à la fermentation de ceux-ci ainsi qu’au séchage et au dépôt du tabac dans des boîtes. C’est à partir de ce tabac que les ouvrières et les enfants fabriquent le coeur du cigare, la filasse. Par-dessus celle-ci, on enrobe le cigare avec une feuille de tabac un peu grossière appelée la sous-cape. La dernière opération consiste à enrober celle-ci avec une feuille de tabac importée et peu veinée. Toute cette production est vendue annuellement à des compagnies de tabac connues au Canada comme Imperial TobaccoBenson & HedgesRock City Tobacco, etc. En ce qui concerne le tabac à pipe, le Tabac Canadien Rose Quesnel, il est commercialisé en paquet par la compagnie Rock City Tobacco. En 1911, les producteurs vont livrer 518 000 livres de tabac à la coopérative; l’année la plus fructueuse sera celle de 1940 avec 2 240 395 livres de tabac qui seront transformées par la coopérative. 

Une coopérative de tabac à Saint-Césaire

Le contexte économique ainsi qu’un sol propice à la culture du tabac amènent les cultivateurs à se regrouper, en 1911, pour fonder une coopérative de transformation du tabac produit dans la région. Le 2 juillet 1911, le nouvel organisme est incorporé sous le nom de Société Coopérative Agricole de la Vallée d’Yamaska. Cinq jours plus tard, la coopérative achète de M. L. Chabotte, et ce, au coût de 900 $, un terrain de trois arpents situé le long du chemin de fer de la compagnie Central Vermont Railway. La même année, on y construit un premier bâtiment au coût de 25000 $. Cet immeuble en briques de 200 pieds x 60 pieds possède deux étages; une chambre à bouilloire de 20 pieds x 30 pieds est contiguë à l’édifice principal. Le 10 août 1918, la coopérative achète de M. Otto P. Brenner, l’édifice voisin qui devient l’usine no 2 du complexe coopératif. 

Durant 53 ans, des millions de livres de tabac produit par les cultivateurs de la région seront transformées dans ces deux usines. Dans les années 1950, l’arrivée chez les fabricants de cigares canadiens d’une enveloppe synthétique entourant le cigare, l’abandon progressif de fumer la pipe, ainsi que de nouvelles règles sanitaires entourant le tabagisme expliquent en grande partie le déclin de la production régionale de tabac. Finalement, à partir de 1965, la transformation du tabac cesse dans les installations de la coopérative de Saint-Césaire. Le tabac des producteurs est alors mis en ballots et expédié à l’usine de la coopérative de Saint-Jacques, dans la région de Joliette. La dernière récolte de tabac dans la région est produite à Ange-Gardien en 1986. 

Séchoir à tabac de quatre étages à Saint-Césaire en 1956; les plants de tabac sont suspendus à l’aide d’une broche pour y sécher durant 3 mois.

Ouvrières participant à la transformation du tabac à cigare vers 1940.

Les « coteurs » à l’œuvre de gauche à droite : Ovila Sansoucy, Frédéric Lafrance, Léo Giroux, Bernard Tessier et Euchariste Giroux en 1952 : ils jugent la qualité du tabac, donc du prix à donner aux producteurs.

Emplacement du panneau sur La Route des Champs

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Gilles Bachand, Historien

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